“Si nous ne menons pas la bataille, personne ne la mènera.” Julia Faure, co-présidente du mouvement Impact France
Il y a quelques jours, Marie Thivoyon et Raphael Bosch-Joubert étaient aux Universités d’Été de l’Économie de Demain 2025 du Mouvement Impact France.
Au cours des différents workshops auxquels l’équipe à assisté, un thème a émergé avec une force nouvelle : la souveraineté.
Suite aux chocs mondiaux, comme la pandémie ou la guerre en Ukraine, la dépendance de notre économie aux matières premières est devenue une faiblesse. Cette situation a remis en question les échanges internationaux, poussant la relocalisation industrielle et l’indépendance énergétique du statut d’options à celui d’impératifs stratégiques.
La souveraineté est multiple et touche à la fois, la démocratie, l’économie, l’énergie, l’alimentation, le numérique,…
Comme l’a souligné l’ancienne ministre, et Présidente de la Commission de régulation de l’énergie, Emmanuelle Wargon lors de propos sur les territoires énergétiques, « l’écologie est une opportunité pour l’Union Européenne » d’affirmer sa singularité et de conquérir des parts de marché. La souveraineté n’est pas un repli, mais une capacité à se projeter, à s’approprier les enjeux et à agir.
Le combat pour la souveraineté énergétique : Dépasser le paradoxe français
Le premier combat pour l’autonomie se joue sur le terrain de l’énergie. Les échanges de Xavier Piechaczyk (RTE) et Emmanuelle Wargon (CRE) révèlent un paradoxe français saisissant : si 84% de notre production d’énergie est décarbonée, 60% de notre consommation reste fossile, notamment dans les secteurs du transport et de l’industrie.
Le combat est donc fondamental pour sortir du pétrole et du gaz, à la fois pour des raisons environnementales et de souveraineté.
La France a pourtant des atouts considérables : une production d’électricité décarbonée et un réseau électrique « exceptionnel » en comparaison internationale.
L’enjeu est de catalyser cette production pour répondre à la demande croissante de l’industrie, du transport, et de nouvelles technologies comme l’intelligence artificielle et les data centers.
Le véhicule électrique en est une parfaite illustration. Aurélien de Meaux (Electra) a rappelé les deux questions principales des Français : l’autonomie et le temps de recharge.
Ses réponses sont nettes : 400 à 600 km d’autonomie et une recharge complète en 20 minutes. Mais le véritable « éléphant dans la pièce » est le signal prix. Il faut que l’intérêt financier soit évident pour encourager l’achat. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : 5 à 7 € pour 100 km en électrique, contre 12 à 14 € pour un véhicule thermique. L’enjeu est désormais de transformer ce « verrou mental » et de créer un narratif qui permette à la France de devenir « les Norvégiens du véhicule électrique ».
Sur ce sujet de la souveraineté énergétique, nous n’avons pas entendu un conseil essentiel, comme si la cause était perdue. Il est pourtant fondamental de réduire la voilure : l’énergie qui n’est pas consommée est une énergie qui n’est ni à produire, ni à importer, ni à payer. Cette énergie là, n’influe pas sur les changements climatiques, préserve notre souveraineté et n’alimente aucun soft power ni course à l’armement.
Les menaces qui pèsent sur notre souveraineté : Le prix d’une mondialisation débridée
Dans un monde où la « fluidité des échanges n’est plus garantie », les effets pervers de la mondialisation se font sentir. Agnès Pannier-Runacher a pointé du doigt la « montée des inégalités », « la fin des ressources naturelles » et le « vieillissement des populations ».
L’Europe fait face à un modèle économique qualifié de « néo-impérial » (États-Unis, Chine, Russie) et de « prédatisme actuel » , incarné par des stratégies qui « démolissent les autres ». Face à la domination américaine et asiatique dans le numérique et à la montée en puissance des stablecoins, l’Europe se retrouve en position de faiblesse, sans alternative crédible pour protéger sa souveraineté économique.
Qu’est-ce qu’un stablecoin ?
Un stablecoin, c’est une cryptomonnaie qui est conçue pour garder une valeur stable. En général, il est adossé à une monnaie “classique” (par exemple 1 stablecoin = 1 dollar, 1 euro, etc.) ou à une réserve d’actifs (or, obligations, etc.).
L’idée : combiner la rapidité et la transparence de la blockchain avec la stabilité d’une monnaie traditionnelle.
C’est comme si vous aviez un jeton numérique qui vaut toujours la même chose qu’un billet palpable dans son porte-monnaie.
Alexis Krycève (HAATCH), Élodie le Breton (GA Smart Building), Dominique Potier et Jack Azoulay (Argos) ont également évoqué la « peur » et le « backlash » politique et économique qui freinent l’action. Un constat alarmant a été fait : « celui qui produit dans les pires conditions est aussi celui qui propose les prix les plus bas ».
En réaction à cette mondialisation débridée, la France et l’Europe ont pensé le devoir de vigilance. Il oblige les donneurs d’ordre à être responsables de toute la chaîne de valeur. Ça change tout. C’est un nouveau récit. Cela essaime peu à peu. Mais cette responsabilité pesant sur le commanditaire et sa chaîne d’intermédiaires à déclenché le Backlash et un recul immense du Pacte Vert (Green Deal Européen).
Il est donc temps d’affronter le réel et de ne pas se soumettre à une course vers le bas.
Top 10 des conseils entendus lors des UED 2025
- Maintenir une posture offensive plutôt que défensive : Agir et innover dans la durabilité est bon pour l’entreprise (Jack Azoulay).
- S’appuyer sur des dirigeants engagés et des investisseurs de long terme (Jack Azoulay).
- Créer un écosystème pour sortir de la solitude du dirigeant (Jack Azoulay).
- Être dans le concret avec des indicateurs fiables pour mesurer l’impact des actions RSE (Jack Azoulay).
- Ne pas revenir à une situation défavorable pour la RSE, même face à la déconstruction du Pacte vert (Dominique Potier).
- Ne pas se déresponsabiliser sur la chaîne d’intermédiaires et incarner le devoir de vigilance (Dominique Potier).
- Continuer le reporting RSE volontairement même si la loi change, comme l’a fait GA Smart Building suite au coup de massue de l’Omnibus sur la CSRD pour les ETI (Elodie le Breton).
- Prendre de la hauteur et se souvenir des raisons initiales de l’engagement RSE (Elodie le Breton).
- Répondre aux attentes de l’opinion publique qui souhaite que les entreprises travaillent sur la santé et l’environnement (Elodie le Breton).
- Proposer un nouveau modèle économique avec le devoir de vigilance, qui ne doit pas être anti-capitaliste (Dominique Potier).

